Article : les symboliques de Pâques en Expression Primitive
Qu’est ce à dire ?
En revisitant le mythe hébraïque dans une lecture qui revient aux sources de la langue nous allons tenter une compréhension de ce mythe dans un autre plan, un nouveau plan, réactualisable autant de fois que nous y reviendrons si nous acceptons de nous laisser informer par son essentiel vivant.
J’aime l’éclairage que m’apportent les travaux d’Annick de Souzenelle. Un lait précieux pour les chercheurs de symboles vivants et vivifiants. Un nectar qui m’inspire dans mon travail de danse rythme thérapeute par l’Expression Primitive. Le symbole réunifie, rassemble. Fait écho.
Nous danserons prochainement les symboles de tout ce qui va se dire en suivant. Je suis donc en phase de réflexion, celle qui précède la construction de la séance en geste , en rythme est en voix. Je m’apprête à méditer les mythes concernant la fête de Pâques. Nous pouvons étudier dans les mots et nous pouvons en tant que danseurs relier cette réflexion ( dans le sens de réfléchir , renvoyer une information vers l’au dehors de soi ) à notre pratique de l’expression par le corps,
Pâques. Il sera donc question de passage. C’est cette année le focus qu’il m’intéresse d’aller rencontrer. Pessoah en hébreux. A ceci prés qu’il s’agit de « passage au dessus. » Au dessus de quoi ? Dans le texte biblique, la 10eme plaie d’Egypte est définie comme étant le passage de l’Ange exterminateur. Il passe au dessus des maisons des Hébreux, les évitant, parce que leurs linteaux ont été marqués de la marque du sang d’un agneau. Les maisons qui ne portent pas ce signe sont celles des Egyptiens.
Le peuple hébreux s’est levé et s’apprête à partir. Il décide de quitter une terre d’esclavage, connue, pour une terre promise, inconnue. L’annonce de cette promesse est portée par un prophète, Moïse, le « sauvé des eaux » Le Pharaon s’entête, le peuple hébreux, lui, accepte l’idée et se prépare au départ.
Accepte ? Pour autant que cela augure un possible mieux il est loin d’être facile de quitter ce que l’on connait. Quitter ce dans quoi nous sommes nés, tissés, construits. Pourquoi ? Qu’est ce qui appelle ?
La part de soi qui veut vivre. Ce qui pousse l’humain, le vivant chaque année à porter ses bourgeons au bouts des arbres morts. Ce principe qui agit à travers tous et toutes choses vivantes sur cette terre, dans tous les règnes à la fois. .
Mais revenons à notre « passer au dessus ».
Voyons la série des fameuses plaies d’Egypte à l’éclairage des traductions de l’hébreu par Annick de Souzenelle et imaginons en le récit du rituel et les liens possibles avec nos questions existentielles. Les eaux troubles, infectées : notre conscience polluée par des modes de pensées qui excluent la vie et ne savent plus boire aux sources claires. Passer au dessus et bondir « hors de » : la grenouille, ce drôle d’animal entre poisson et lézard au gout de poulet, capable de se transformer sous l’effet d’un baiser ( des épousailles) si peu que nous lui fassions confiance et ne nous fions pas à son apparence. Passer aux dessus de la vermine. La vermine que causent nos certitudes « ceci est cela c’est ainsi et pas autrement » Certitudes sur soi, sur l’autre, les autres, le monde. Et cette même certitude pourtant qui produit la persévérance. Passer par le noir, les insectes noirs grouillants dans nos ténèbres intérieures, nos noirceurs, nos blattes et nos cafards. Traverser, plonger dans ce rebutant marasme et re-sortir avec la bestiole qui doit être mise en lumière pour qu’elle devienne information . Puis la peste. Qui fond sur notre humanité désaxée. La lèpre enfin , symbole de l’orgueil, de l’égo rendu tout puissant. Et voilà la grêle : qui symbolise les paroles , les bavardages, l’invective. Puis les sauterelles qui razzient tout si nous ne les razzions pas avant. .
Aller vers, c’est quitter. Devenir autre, c’est mourir à. Passer au dessus c’est laisser en dessous de soi, derrière soi.
Ref : Annick de Souzenelle. Vas vers toi. Edition Albin Michel. À la lumière de la psychologie des profondeurs, de la tradition chrétienne et de la richesse de la langue hébraïque, le livre de l’Exode, qui n’était pour beaucoup que le récit légendaire de la sortie d’Egypte du peuple hébreu, se révèle ici un véritable livre de vie. Les chiffres deviennent symboles, les mots et les noms déploient des trésors de sens, et les dix plaies qui s’abattent successivement sur le pays de Pharaon, pour l’obliger à laisser partir le peuple juif, sont autant d’épreuves proposées à l’homme sur le chemin de sa libération intérieure, de sa Pâques intime. À travers cette lecture vivante d’un livre de la Bible, loin des interprétations banalisantes, moralisatrices ou historicistes, Annick de Souzenelle nous invite à redécouvrir une tradition dans ses racines premières.
Ref : Annick de Souzenelle / les Dix plaies d’Egypte https://youtu.be/oEkGc0xbQfk
Ref: Marie Balmary. La divine origine. Editions Grasset 1993